Transport à La Réunion : impasse routière

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Déjà 34 morts sur les routes entre le 1er janvier et le 24 novembre 2024

30 novembre, par Manuel Marchal

La Réunion souffre du monopole du tout-automobile. La voiture individuelle domine largement, représentant environ 80 à 85 % des déplacements quotidiens. Les transports en commun, les bus et le téléphérique de Saint-Denis, ne couvrent qu’environ 10 % des besoins de mobilité, tandis que les déplacements à pied ou à vélo, bien qu’encouragés, restent limités. À ce jour, les habitants n’ont d’autre choix que d’utiliser la voiture, la moto, le bus ou de marcher en bordure des routes, souvent à haut risque. Ce manque d’alternatives alimente une crise de mobilité qui se traduit par une insécurité routière alarmante.

Un pays sans train, un projet financé abandonné

Le transport ferroviaire était en service à La Réunion. Son coup d’arrêt fut donné au moment du début de la construction de la première route du littoral. Dans les années 2000, un projet de reconstruction d’un réseau ferré était bien engagé. Les financements avaient été obtenus et les travaux commençaient. C’était une réponse aux embouteillages, aux dangers de la route et au coût de l’importation des carburants. Le train devait en effet fonctionner à l’électricité. Ce chantier a été stoppé en 2010 par une décision locale acceptée par l’État, après un changement de présidence au Conseil régional. Didier Robert, président de Région à l’époque, a signer un accord avec l’État pour réaffecter les fonds prévus pour le train au chantier de la Nouvelle Route du Littoral (NRL). Cette route en mer, en construction depuis plus d’une décennie, reste inachevée, laissant l’île sans alternative au réseau routier pour les déplacements en dehors de son voisinage.

Routes modernes, mais comportements dangereux

Les infrastructures routières réunionnaises sont comparables à celles des pays européens, avec des voies rapides nombreuses. Elles ceinturent l’île de Saint-Benoît à Saint-Pierre en passant par Saint-Denis. Ces routes favorisent la vitesse. Elle est beaucoup plus importante que chez les pays voisins de La Réunion. La vitesse continue de provoquer des drames. Les véhicules importés sur l’île sont tous homologués pour circuler au-dessus de 110 km/h, vitesse maximale autorisée. L’intégralité du parc automobile homologué a la capacité de ne pas respecter la loi, d’un simple coup d’accélérateur.

Par ailleurs, l’alcool est souvent responsable d’accidents.

Quelles solutions pour réduire les accidents ?

Plusieurs mesures spécifiques à La Réunion pourraient améliorer la sécurité routière :

Tout d’abord, limiter la vitesse maximale des véhicules : en bridant les voitures importées à 90 km/h, on pourrait réduire significativement l’ampleur des accidents. La vitesse diminue le temps pour agir face à un imprévu. En cas de choc, la vitesse augmente les dégâts : percuter un piéton à 60 km/h équivaut à lui faire subir une chute de plusieurs étages.

Ensuite, installer des éthylotests obligatoires pour lutter contre l’alcool au volant : ces dispositifs, déjà imposés dans les bus, pourraient être généralisés à tous les véhicules automobiles pour prévenir les conduites en état d’ivresse.

Enfin, investir dans des transports collectifs plus nombreux et plus fréquents est une piste qui s’inscrit plus largement dans le réaménagement du territoire. La relance d’un réseau ferré et le développement d’un véritable système de transports en commun articulé autour de la ligne ferroviaire pourrait diminuer la dépendance à l’automobile.

Une responsabilité politique

Le bridage à 90 km/h des véhicules à moteur et l’éthylotest dans toutes les voitures sont-ils applicables dans le cadre actuel ? Si ce n’est pas le cas, il importe alors d’explorer les possibilités d’adaptation qui peuvent exister, et chercher comment légaliser de telles propositions à La Réunion.

La situation actuelle à La Réunion est le résultat d’un manque de vision à long terme en matière de mobilité. Si l’abandon du projet ferroviaire a aggravé cette crise, il est malgré tout possible d’agir pour limiter les risques pris par les usagers de la route. En réduisant les vitesses, en luttant contre l’alcool au volant, et en développant des alternatives au tout-automobile, les Réunionnais n’auraient plus l’automobile ou la moto comme seul moyen de déplacement, avec tous les risques qu’il comporte : 34 morts depuis le début de l’année.

Chaque vie perdue sur les routes rappelle l’urgence de mesures adaptées aux besoins des Réunionnais.

M.M.






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